L’artiste française Gwenaël Hémery a réalisé à l’automne 2013 une résidence de création au département de céramique de la Maison des métiers d’art de Québec. Son projet, Un nouveau monde de chaos et de hasard, s’inscrit dans notre programme de résidences croisées avec l’Institut européen des arts céramique à Guebwiller en Alsace. Elle nous présente le fruit de ses expérimentations.
Des chaos, des nouveaux mondes résultant du hasard des cuissons. Des matériaux différents, des techniques de cuissons, et mes sensations dans un nouvel environnement sont les facteurs qui ont influencé mon processus de création.
Mon approche de la céramique est expérimentale. Je recherche un total lâcher prise sur la notion de résultat. C’est le processus de fabrication, d’enfournement et de cuisson qui importe. Le hasard y joue aussi un rôle majeur dans mes expériences. Il va au-delà de mon imagination. Je le laisse donc me surprendre à chaque défournement. Je travaille beaucoup plus les matériaux que les formes. J’apprends à les connaître et à comprendre leurs réactions à la cuisson et aux superpositions des uns sur les autres. Je les modifie parfois pour observer encore d’autres phénomènes physiques et chimiques. La phase d’enfournement est la phase d’accumulation des matériaux. En effet, je prépare au préalable des éléments multiples de nature différente et ils ne sont assemblés qu’à ce moment là, et quand c’est possible, directement dans le four. La construction est instinctive mais résulte de réflexions et expériences passées. J’y teste souvent les limites de l’équilibre et dois protéger les fours des coulures potentielles engendrées par d’énormes couches d’émaux. Ceci implique que ces éléments d’enfournement (plaques, plateaux, quilles) peuvent faire parfois partie des pièces finales.
Semi-grès, faïence, brique réfractaire, émaux, fil de cuivre – cuisson cône 6 en oxydation
La vie de ces arrangements chaotiques se dévoile dans le détail et dans la richesse des interactions entre les matériaux.
Émail qui bulle, cuivre qui cristallise
Incrustation de basalte dans la terre. À cône 08, la roche devient poudre, se charge en humidité et gonfle, ce qui fragilise la terre. À cône 6, la poudre se vitrifie et reste stable.
Semi-grès, faïence, brique réfractaire, émaux, fil de cuivre et verre – cuisson cône 6 en oxydation
J’ai profité de cette résidence pour expérimenter de nouveaux matériaux : pare-brise, poudre de semi-porcelaine, faïence, fil électrique (cuivre).
Pare-brise empilé sur semi-grès entouré de papier aluminium – Cône 08 en oxydation
Pare-brise dans semi-grès, semi-porcelaine et fils de cuivre fondus dans email – cône 6 en oxydation
Pare-brise en goutte sur poudre de semi-porcelaine – cône 6 en oxydation
Faïence 1 avec 20% de fritte 3124 en surplus. La faïence fond et bulle pour donner une texture interne très alvéolée- cône 6 en oxydation
J’ai aussi fait des essais de transfert d’images en couleurs. Enfin, j’ai voulu retrouver un peu ma peinture et tester des effets de matière et de texture sur des plaques, comme des toiles.
Transfert d’impression laser couleur sur semi-grès dégourdi – cône 08 en oxydation
Détail, transfert d’impression laser couleur sur semi-grès dégourdi – cône 08 en oxydation
Semi-grès, engobe noir, fil de cuivre – cône 6 en oxydation
Détail, semi-grès, engobe noir, fil de cuivre – cône 6 en oxydation
Technique du transfert d’impression laser couleur sur semi-grès dégourdi:
Appliquer du médium acrylique sur le côté imprimé. Apposer la face imprimée sur la céramique. Aplatir pour enlever les bulles d’air. Attendre que ça sèche. Humecter d’eau le papier et frotter doucement avec le doigt jusqu’à ce qu’il n’y ait plus de papier blanc. La photo imprimée reste dans le médium acrylique qui lui-même a été absorbé en surface par la céramique. Cette technique fonctionne aussi sur semi-grès cône 6.